L'ordonnance de protection
L'ordonnance de protection
Il s’agit d’une mesure de protection instaurée par la loi du 9 juillet 2010 relative aux violences faites spécifiquement aux femmes, aux violences au sein des couples et aux incidences de ces dernières sur les enfants et précisée par l’article 515-9 du Code civil (modifié par la loi n°2019-1480 du 28 décembre 2019)
Une ordonnance de protection est une décision rendue par un juge aux affaires familiales (JAF) afin d'assurer, en urgence, (dans un délai de 6 jours à compter de la date d'audience) une protection aux victimes de violences conjugales ou intrafamiliales, en l’absence même de tout dépôt de plainte.
En effet, une victime peut saisir le juge aux affaires familiales avant, pendant ou après une procédure pénale (dépôt de plainte) et même avant ou après une séparation.
Requête à télécharger :
Notice en ligne :
Qui peut adresser une telle requête au juge aux affaires familiales?
Toute personne victime de violences exercées au sein d’un couple, actuel ou ancien, mariée, pacsée ou en union libre, quelque soit la durée de la relation et l’existence ou non d’une réelle cohabitation.
et/ou toute personne majeure menacée de mariage forcé.
Les violences doivent mettre en danger immédiat la victime qui en fait la demande et/ou ses enfants.
Les violences peuvent être physiques (gifles, coups, strangulations, brûlures,…), psychologiques (menaces, intimidation, harcèlement, insultes, emprise, dégradation de biens...), économiques (dépendance financière, confiscation de moyens de paiements, …), sexuelles (agressions sexuelles, viols, …)
Le procureur de la république peut également saisir le juge aux affaires familiales, avec l’accord express de la victime.
C’est au demandeur d’apporter les preuves de l’urgence et des violences :
Afin d’aider le juge aux affaires familiales dans sa prise de décision, la victime doit lui fournir le plus de preuves possible :
toutes les pièces obtenues légalement sont admissibles.
certificats médicaux datés d’un médecin traitant, de SOS MÉDECINS, d’une unité médico-judiciaire, d’un médecin spécialisé (psychologue, psychiatre, pédiatre, …)
attestation de tiers (famille et/ou entourage proche via des attestations sur l’honneur), attestation de professionnels en lien avec la famille (services sociaux, éducateurs, instituteurs, infirmières, …) : ces attestations doivent être datées et signées
déclaration de main courante et/ou récépissé de dépôt de plainte (possibilité d’en demander des copies auprès des commissariats ou de la gendarmerie)
photographies des lésions, plaies, des actes incriminés (effraction de domicile, dégradation,...) avec précisions sur la date, le lieu,...
copies des échanges par SMS, Mails, courriers, …
via le Journal, réalisé par les victimes elles-même, sur le site “Mémo de vie” (https://memo-de-vie.org/)
copie de précédentes condamnations de l’auteur, des ordonnances de jugement ou de non conciliation,...
C’est à la victime de préciser ses demandes :
La victime doit faire des demandes précises au juge aux affaires familiales grâce au formulaire rédigé comme suit :
Concernant l’auteur :
“L’interdiction pour le défendeur de recevoir, rencontrer ou d’entrer en relation, de quelque façon que ce soit, avec vous et avec d’autres personnes dont vous devez préciser l’identité”
“L’interdiction pour le défendeur de se rendre dans certains lieux dans lesquels vous vous trouvez habituellement et que vous devez préciser”
“L’interdiction pour le défendeur de détenir ou de porter une arme”. Il est important ici pour le demandeur de préciser s’il a connaissance d’une autorisation de port d’arme et décrire le plus précisément possible l’arme que possède le défendeur.
“Que soit proposé au défendeur une prise en charge sanitaire, sociale ou psychologique, ou un stage de responsabilisation pour la prévention et la lutte contre les violences au sein du couple et sexistes.”
“L’interdiction pour le défendeur de se rapprocher de vous à moins d’une certaine distance assortie de l’obligation de porter un dispositif électronique mobile anti-rapprochement. (voir le post sur le bracelet anti-rapprochement pour plus de détails sur ce dispositif) Attention : Cette mesure ne peut être demandée que si la victime a préalablement demandé une interdiction de contact.
Concernant les enfants :
Pour l’exercice conjoint ou exclusif de l’autorité parentale, possibilité de demander :
le maintien de l’exercice conjoint de l’autorité parentale
l’exercice exclusif de l’autorité parentale avec un droit de visite et d’hébergement pour le défendeur. (dans un espace de rencontre médiatisé ou en présence d’un tiers de confiance)
l’exercice exclusif de l’autorité parentale sans droit de visite et d’hébergement pour le défendeur”
un droit de visite et d’hébergement dans un lieu médiatisé,
le lieu de résidence habituelle du ou des enfants à une adresse déterminée
une demande d’interdiction de sortie du territoire du ou des enfants sans autorisation conjointe des parents
Concernant le logement :
Si la victime en fait expressément la demande, le logement commun est, par principe, attribué à la victime même si elle a bénéficié d’un hébergement d’urgence.
De plus, une ordonnance de protection permet l’attribution prioritaire d’un logement social.
La victime de violences peut être autorisée à dissimuler son adresse et à élire domicile :
chez son avocat
auprès du Procureur de la République près le tribunal judiciaire saisi
chez une personne morale qualifiée (comme une association d’aide aux victimes par exemple)
Concernant les obligations financières :
La victime peut demander :
une contribution financière de la part du conjoint auteur en cas de mariage ou une aide matérielle de la part de votre partenaire en cas de concubinage
une contribution à l’entretien et à l’éducation du ou des enfants (en précisant le montant, le versement ou le choix d’un versement par l’intermédiaire de l’organisme débiteur des prestations familiales
En cas de mariage forcé :
La victime peut demander au juge aux affaires familiales de prononcer à son égard une interdiction temporaire de sortie du territoire.
La représentation par avocat est-elle obligatoire ?
Non, le demandeur peut saisir seul son formulaire d’ordonnance de protection et l’adresser au juge aux affaires familiales sans être représenté par un avocat.
Toutefois, comme toujours, il peut être préférable de se faire aider et soutenir dans une telle démarche via un avocat et/ou un service d’aide aux victimes.
En effet, il est parfois difficile, surtout dans l’urgence de remplir correctement une telle requête, de fournir toutes les pièces exigées,...
A noter : le demandeur peut bénéficier d’une aide juridictionnelle (totale ou partielle selon ses revenus) s’il en fait la demande.
La procédure:
Comment et où transmettre la requête ?
Les requêtes sont téléchargeables en ligne (voir plus haut).
Les victimes peuvent les remplir seules, avec son avocat ou l’assistance d’un service d’aide aux victimes.
Une fois la requête remplie par la victime, il s’agit de l’adresser au greffe du Tribunal Judiciaire avec l’intégralité des motifs et des pièces justificatives.
Le Tribunal Judiciaire et le juge aux affaires familiales territorialement compétents seront ceux de la résidence habituelle du domicile conjugal ou celui du défendeur (de l’auteur) ou encore de la résidence habituelle de l’enfant.
La requête peut être adressée par lettre simple, avec accusé de réception ou directement être déposée à l’accueil du tribunal (au SAUJ : service d’accueil unique du justiciable) contre émargement.
Le greffe va alors transmettre la requête, sans délai, au juge aux affaires familiales, qui va devoir rendre une ordonnance fixant la date de l’audience, dans les six jours.
La victime, partie demanderesse, sera convoquée à l’audience par lettre recommandée avec accusé de réception ou verbalement contre émargement ou récépissé.
Comment l’auteur est-il informé de la procédure et convoqué à l’audience ?
Plusieurs possibilités en fonction des cas et de l'urgence, même si les frais de la signification par huissier de justice seront toujours pris en charge par l’Etat.
- Si un avocat a été mandaté par la victime, il se chargera lui-même de faire notifier cette ordonnance fixant la date de l’audience, la requête et les pièces justificatives à la partie défenderesse (l’auteur), par voie d’huissier de justice dans un délai de deux jours.
- Dans le cas contraire, c’est le greffe du juge aux affaires familiales qui s’en chargera directement.
- L’ordonnance peut également être notifiée par voie administrative en cas de danger grave et imminent pour la sécurité d’une personne concernée par l’ordonnance de protection ou lorsqu’il n’existe pas d’autre moyen de notification.
Comment se déroule une audience d’ordonnance de protection ?
L’audience n’est pas une audience ouverte au public, elle se déroule dans le bureau fermé du Juge aux affaires familiales.
Les deux parties doivent être présentes ou se faire représenter par un avocat. Toutefois, le juge aux affaires familiales pourra rendre sa décision même en l’absence du défendeur (auteur) ou de son avocat.
Le juge va entendre les deux parties ainsi que le Procureur de la République s’il est présent (dans le cas contraire, le parquet aura préalablement rendu un avis écrit motivé et documenté si besoin)
Le juge aux affaires familiales pourra :
décider, à la demande des parties ou de sa propre initiative, d’entendre séparément les parties sur leurs explications et observations
examinera les pièces qui lui seront remises. A noter que le juge ne pourra pas prendre en compte un élément de preuve dont la partie adverse n'aura pas eu préalablement connaissance.
A l’issue de l’audience : Le juge va rendre une ordonnance de protection pour une durée maximum de 6 mois.
Cette ordonnance est exécutoire à titre provisoire (sauf décision contraire du juge) après signification à la partie adverse par voie d’huissier de justice.
Cela signifie donc que l’ordonnance de protection pourra être exécutée même si la partie adverse fait appel (dans un délai de quinze jours suivant sa notification)
Renouvellement et/ou modifications des mesures : Les mesures prononcées par l'ordonnance de protection pourront être prolongées si, pendant le délai initial d’une durée maximale de 6 mois, une requête en divorce ou en séparation de corps a été déposée ou qu’une demande relative à l’exercice de l’autorité parentale a été introduite. Le renouvellement de ces mesures sera alors automatique.
De même, elles peuvent à tout moment être modifiées, complétées, supprimées ou suspendues par le juge sur demande et après audition de chaque partie.
Que faire en cas de non-respect des obligations et interdictions prescrites dans l’ordonnance de protection ?
Le non-respect et la violation des mesures imposées dans l’ordonnance de protection constitue un délit à part entière, puni de deux ans d’emprisonnement et de 15 000 € d’amende.
Il convient donc à la victime de prévenir les services de Police ou de gendarmerie dans les plus brefs délais. L’auteur sera convoqué par les services enquêteurs, placé en garde à vue et une date d’audience lui sera notifiée après présentation devant le procureur de la République (en vue d’une audience en comparution immédiate)
Le cas particulier du bracelet anti-rapprochement :
Comme vu plus haut, le juge aux affaires familiales pourra rendre sa décision même en l’absence du défendeur (auteur) ou de son avocat. Toutefois, la mesure de port d’un bracelet anti-rapprochement, si elle est demandée par la victime et/ou le procureur de la République, ne pourra être prononcée que si le défendeur est présent à l’audience et y donne expressément son accord et son consentement libre et éclairé.
De même, les mesures prononcées par l’ordonnance de protection ont une durée maximum de six mois et peuvent être renouvelées de manière automatique (si le juge est saisi pendant leur durée d’application d’une requête en divorce, en séparation de corps, ou d’une demande relative à l’exercice de l’autorité parentale).
Toutefois ce renouvellement automatique ne s’applique pas à la mesure de port d’un bracelet anti-rapprochement qui ne peut être renouvelé qu’après réitération des consentements écrits et éclairés des deux parties.
Ce renouvellement de consentement au port du bracelet anti-rapprochement se fera via les services de polices ou du service d’aide aux victimes saisis pour la personne à protéger et via les services d’insertion et de probation pour la personne à surveiller.
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